Stop OTAN

Dans leur livre « Stop à l’OTAN », les auteurs Hervé Hannoun et Peter Ditius expliquent les dangers encourus aujourd’hui par la France et l’Union Européenne par leur adhésion à l’OTAN. L’organisation sous domination américaine empêche la France, depuis qu’elle l’a rejointe en 2008, de continuer à mener une politique étrangère indépendante et équilibrée. De la même manière, l’OTAN fait obstacle à la construction d’une défense européenne et crédible. En outre, l’émergence de nouvelles sources de tensions entre les Etats-Unis et la Russie, spécialement sur la question ukrainienne, ainsi que l’actuelle doctrine nucléaire américaine risquent d’emporter l’Union Européenne dans un conflit non voulu. Les auteurs plaident en faveur d’un retrait non seulement de la France, mais aussi de tous les pays européens membres de l’OTAN de cette organisation, afin de garantir leur indépendance vis-à-vis des Etats-Unis ainsi que pour pouvoir rediriger ces fonds vers le domaine social ou environnemental.

Dans leur livre Stop à l’OTAN, Hervé Hannoun et Peter Dittus exposent les dangers que pose l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord pour la sécurité et l’indépendance de la France, et plus largement de l’Union Européenne. Face à la transition d’une « Europe de la Paix » à une « Europe de la guerre », ils pensent que les élections européennes de mai 2019 doivent être une occasion pour les européens de s’exprimer sur ce sujet et de dire stop à l’OTAN.

Ils observent un retournement dans la politique étrangère de la France au moment de sa réintégration dans l’OTAN décidée en 2008 par Nicolas Sarkozy. Cette décision rompt avec la politique de Charles de Gaulle après la Seconde Guerre mondiale, qui voulait une France « non-alignée » et « indépendante » vis-à-vis des Etats-Unis. L’OTAN était considérée, à cette époque comme aujourd’hui, comme un organisme sous le contrôle quasi-total des Etats-Unis. La décision de N.Sarkozy de rejoindre l’OTAN s’est faite sans consultation du parlement, malgré les importantes conséquences qu’elle comportait. Depuis ce moment, la politique étrangère française s’est montrée largement pro-américaine. Malgré quelques prises de distance, Emmanuel Macron, comme François Hollande, n’a pas changé d’orientation et a écarté toute possibilité de quitter l’OTAN. Ce positionnement est celui du Quai d’Orsay qui est résolument atlantiste.

Les auteurs expliquent que 4 nouvelles crises majeures ont perturbé l’équilibre géopolitique et ont rendu l’appartenance à l’OTAN bien plus dangereuse qu’elle l’était en 2008.

Il s’agit d’abord de la situation ukrainienne qui suit l’annexion de la Crimée par la Russie, qui a relancé les tensions entre les Etats-Unis et la Russie, et par conséquent entre tous les pays membres de l’OTAN et la Russie. L’adhésion à l’OTAN force ses membres suivre la politique américaine en faveur du gouvernement ukrainien et en opposition à la Russie, sans laisser la place à une posture plus équilibrée.

La deuxième crise est la guerre en Syrie, et encore une fois, selon les auteurs, l’appartenance à l’OTAN force la France a se positionner sans mesure en opposition complète au régime de Bachar el-Assad, sans hiérarchiser avec la menace djihadiste dans le pays.

Un troisième point est l’élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis, qui marquerait un bouleversement radical dans la politique extérieure américaine et donc dans celle de l’OTAN. Ce bouleversement se traduit par une attitude de plus en plus agressive des Etats-Unis, ce qui représente un danger accru de conflit.

Enfin, la nouvelle stratégie de sanctions des Etats-Unis pourrait relancer des conflits mondiaux. Washington a régulièrement recours à des sanctions économiques et financières sévères envers les Etats qu’ils considèrent comme hostiles, comme l’Iran par exemple.

Les auteurs mettent en garde contre l’accroissement des tensions internationales qui risquent de relancer des conflits. La France pourrait se retrouver forcée à y participer en raison de son implication dans l’OTAN.

H.Hannoun et P.Dittus montrent combien l’OTAN est polarisée les tensions entre la Russie et les Etats-Unis, et en quoi la crise ukrainienne a cristallisé le conflit. Les auteurs soutiennent que ces tensions ont également été exacerbées par l’extension progressive de l’OTAN aux ex-pays du pacte de Varsovie. Cette décision est largement critiquée, car elle est vue par la Russie comme une provocation, voir un danger par le rapprochement de l’influence américaine de ses frontières. Ce problème est également lié à l’imbrication de l’Union Européenne dans la politique de l’OTAN, car plusieurs de ces pays de l’est l’ont rejointe à la même époque. Ainsi, l’Union Européenne se retrouve au centre des tensions entre la Russie et les Etats-Unis, et en devient même un accessoire, risquant d’être entrainée dans un conflit entre ces deux Etats. Les auteurs rajoutent que ce risque est également amplifié par la méfiance, voir l’hostilité, de plusieurs de ces nouveaux pays membres envers la Russie.

Ils analysent également l’influence de l’OTAN du point de vue plus large de l’Union Européenne. Aujourd’hui, 22 des 28 pays composant l’Union font aussi partie de l’OTAN, et pour les nouveaux membres il est presque obligatoire d’adhérer préalablement à l’OTAN. L’influence indéniable de l’OTAN et des Etats-Unis à travers elle empêche la création d’une défense européenne indépendante et crédible. Par ailleurs le mille-feuilles d’organisations de défense en Europe, comme la PESCO (ou politique étrangère et de sécurité commune), l’AED (Agence Européenne de Défense) et l’E2I (Initiative Européenne d’Intervention) complique la situation.

H.Hannoui et P.Dittus expliquent ensuite comment le changement radical de la doctrine nucléaire des Etats-Unis, qui est entre autre appliquée à travers l’OTAN, représente un danger d’escalade dont l’Europe serait le première victime. Ils se réfèrent spécifiquement à un document publié en février 2018 par le gouvernement américain, où est envisagée la possibilité d’utiliser l’arme nucléaire après toute attaque par des armes conventionnelles, soit non nucléaires. C’est un renversement inquiétant de la doctrine nucléaire américaine, qui jusque alors ne concevait l’utilisation de l’arme nucléaire que comme outil défensif en cas d’attaque nucléaire. De plus, le retrait des Etats-Unis du Traité INF (Forces Nucléaires à Portée Intermédiaire), qui avait permis de mettre fin à la crise des euromissiles des années 80, a relancé le déploiement d’armes nucléaires tactiques par l’OTAN dans différents pays d’Europe. On estime qu’il y en a actuellement 150 sur le territoire européen, ce qui fait de l’Union Européenne une cible pour toute attaque nucléaire. Finalement, l’attitude plus offensive des Etats-Unis vis-à-vis du nucléaire, le déploiement d’armes sur le territoire européen ainsi que l’obéissance de l’Union Européenne à travers l’OTAN risque de la placer en danger en cas de conflit entre les deux puissances.

Malgré ce constat alarmant, l’OTAN reste un sujet peu débattu, ce que les auteurs expliquent d’abord par un fort lobby « atlantiste » et le fait que toute critique risque d’être vue comme un argument pro-Russie. Les deux auteurs proposaient de faire de cette question un enjeu central des élections européennes de mai 2019, pour enfin donner la possibilité aux citoyens européens de se prononcer sur ce sujet primordial. Ils décrivent 4 objectifs essentiels :

  • Sortir la France de l’OTAN : un référendum pour voter sur le retrait ou non l’OTAN devrait être organisé, potentiellement à travers des procédures de démocratie semi-directe comme le RIC proposé par les gilets jaunes. Cela permettrait non seulement à la population de se prononcer sur ce sujet essentiel, mais aussi à la France de regagner sa position d’indépendance si le référendum allait dans la direction du retrait.
  • Sortir les 22 pays européens étant également membres de l’OTAN : c’est selon eux une condition essentielle à l’indépendance et la crédibilité de l’Union Européenne, et spécifiquement de la défense européenne.
  • Rediriger les 1000 milliards de dollar du budget de l’OTAN : H.Hannoun et P.Dittus soutiennent que après la fin de la Guerre froide, l’OTAN a continué ses dépenses militaires excessives malgré la disparition du principal ennemi qui avait motivé sa création. Qui plus est, ces dépenses sont même aujourd’hui croissantes, avec l’objectif pour chaque pays de l’OTAN de consacrer au moins 2% de leur PIB à la défense (la France étant aujourd’hui à un taux de 1,8%). Selon les auteurs, cela est encouragé à la fois par le gouvernement américain et par le complexe militaro-industriel. Ils pensent qu’une grande partie de ces montants pourrait être redirigée vers des dépenses sociales ou environnementales qui seraient plus profitables pour la population.
  • Refuser un fédéralisme européen flou : refuser cette tendance de l’Union Européenne à se construire sans processus démocratique, spécialement dans le cas de l’adhésion à l’OTAN qui représente un majeur abandon de souveraineté. Ainsi ils réclament un processus européen plus démocratique, en accord avec la proposition précédente de référendum.

En conclusion, ce livre expose les risques d’implication dans un conflit qui accompagnent l’adhésion à l’OTAN, ainsi que son impact sur la conduite d’une politique étrangère française indépendante et équilibrée. Ces risques sont spécialement importants sur le domaine du nucléaire, car la nouvelle doctrine américaine place à la fois l’Europe comme cible d’une attaque mais risque aussi la dissémination de ces armes et l’escalade des tensions. A partir de ces différents risques les auteurs font un argumentaire efficace en faveur de la nécessité de l’ouverture d’un débat sur le sujet de l’OTAN, et en faveur du retrait complet de la France et des pays membres européens.

Marie Lureau

Voir la vidéo de la « Conférence Stop OTAN » avec Hervé Hannoun et Marie-Noëlle Lienemann le mercredi 15 mai 2109 :

 

IDN

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L’association Initiatives pour le Désarmement Nucléaire (IDN) a pour but d’œuvrer à l’élimination progressive et équilibrée des armes nucléaires de la planète, pour contribuer à l’édification d’un monde plus sûr.

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