Les Français n’ont pas le droit de savoir comment est assurée leur sécurité

En lisant ces extraits de 4 documents, vous comprendrez comment le débat sur la dissuasion nucléaire -que le Président de la République présente comme « la clé de voûte de notre stratégie de défense »– est interdit.

        Vous verrez que les Français n’ont pas le droit de savoir comment est assurée leur sécurité et de donner leur avis.

       Vous apprendrez :

  • que le Président a décidé pour eux ;
  • que lancer un débat risquerait de « donner la parole à tous ceux qui souhaitent se manifester contre le nucléaire » ;
  • que, de toute façon, « le débat a été tranché » !

           Peut-on encore parler de démocratie en France ?

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Valerie Rabault  / AFP / CHRISTOPHE ARCHAMBAULT

1er document : lettre au Président de la République de Valérie RABAULT, Députée du Tarn-et-Garonne, Présidente du groupe Nouvelle gauche et de Paul QUILES, ancien Ministre de la Défense, Président d’IDN (5 juin 2018)

« …. la confiance aveugle dans l’efficacité de cette stratégie est en fait aussi illusoire que celle qui reposait sur la Ligne Maginot ou affirmait que le nuage de Tchernobyl s’était arrêté à nos frontières.

Les évolutions, tant doctrinales qu’en termes de choix technologiques, en cours chez les puissances nucléaires, dont la France, conduisent toutes à abaisser le seuil d’emploi des armes nucléaires et à faire peser sur la sécurité globale des risques considérables. Le recours à la défense anti-missile balistique questionne déjà sur l’efficacité de l’arsenal nucléaire pour dissuader une frappe nucléaire. Par ailleurs, afficher l’existence d’une force de dissuasion ne saurait exonérer le gouvernement de préparer les populations à des attaques nucléaires : refuser cette préparation constitue une grave responsabilité, que le Président de la République, garant de la sécurité de la nation, ne saurait envisager.

Il est grand temps qu’un débat authentique et informé soit enfin organisé dans notre pays entre toutes les parties prenantes, y compris la société civile. Nous vous lançons donc un appel pressant en vue de l’organisation d’un tel débat à brève échéance. »

2ème document : Réponse du Directeur de cabinet du Président de la République, Patrick STRZODA (2 juillet 2018)

« …Sur le nucléaire militaire, des débats existent dans notre pays. Ainsi, l’association IDN a eu l’occasion d’organiser une conférence internationale sur ce sujet à l’Assemblée nationale le 23 janvier 2017. Par ailleurs, députés et sénateurs se saisissent de ce sujet au travers d’auditions ou de missions d’information. »

3ème document : Ma réponse au Directeur de cabinet du Président de la République (12 juillet 2018)

« … Je me permets de souligner le caractère étrange de votre affirmation : « sur le nucléaire militaire nucléaire, des débats existent dans notre pays ». Vous vous appuyez pour cela sur l’organisation par IDN, l’association que je préside, d’une conférence internationale le 23 janvier 2017. S’il s’agit d’un hommage à l’action de cette association, croyez bien que j’y suis sensible. S’il s’agit de laisser entendre que de telles initiatives peuvent se substituer à un authentique débat public, contradictoire et informé entre toutes les parties prenantes, qui n’existe pas en France, c’est une façon d’éluder la question qui est loin de répondre à notre attente.

Quant au rôle des parlementaires, dont vous considérez qu’ils « se saisissent de ce sujet au travers d’auditions ou de missions d’information », dois-je vous rappeler qu’il n’est jamais allé au-delà de l’élaboration de comptes rendus ou de rapports qui n’ont pas permis d’aborder publiquement, directement et dans tous ses éléments l’ensemble de la problématique de la dissuasion ? C’est ainsi qu’au cours de la première année de cette législature, il n’a été question que de la modernisation de la dissuasion nucléaire et que, lorsqu’au Sénat un amendement de Mme Hélène Conway-Mouret à la Loi de programmation militaire a proposé la mise en place d’un grand débat national sur la thématique de la dissuasion nucléaire, le gouvernement a demandé le retrait de cet amendement. »

4ème document : Intervention au Sénat de Christian Cambon, rapporteur de la Loi de programmation militaire, en réponse à l’amendement de Mme Hélène Conway-Mouret (23 mai 2018)

«  Sur le fond, un débat national, c’est quelque chose de très compliqué et de très lourd à organiser. Pour notre part, au sein de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, nous avons des rendez-vous qui nous attendent. Ils concernent la dissuasion nucléaire dans le cadre du lancement de la rénovation de la force nucléaire et de ses deux composantes. À cette occasion, nous pourrons, bien sûr, en débattre.

Par ailleurs, un an après la campagne pour l’élection présidentielle, au cours de laquelle ce sujet a été abordé, j’ai le sentiment que le débat a été tranché. Il ne me paraît pas forcément judicieux de le relancer, au risque de mettre ainsi à nouveau en lumière toutes les oppositions sur le sujet et de donner la parole à tous ceux qui souhaitent se manifester contre le nucléaire d’une manière générale. »

La ministre, Mme Geneviève Darrieusecq, a alors demandé, au nom du gouvernement, le retrait de l’amendement !

Paul Quilès

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