Le réarmement de la Russie

Bien que contradictoire et confus, l’article ci-après illustre le climat de confrontation que certains commentateurs, à l’Ouest comme à l’Est, cherchent à entretenir.

Le nouveau programme d’armement russe est sans doute de l’ordre de 330 milliards de dollars sur 10 ans, alors que celui des Etats-Unis est de plus de 200 milliards de dollars pour la seule année 2018. D’où provient la course aux armements ? Les Russes seraient d’ailleurs bien en peine de concurrencer sérieusement les Américains sur ce terrain.

Quant aux menaces de « conquêtes » russes, il est difficile d’en voir la concrétisation. Les parties du conflit du Donbass, Ukraine comme Russie, sont toutes deux responsables de la non-application des accords de Minsk, qui offrent à ce jour la seule perspective de cessez-le-feu durable. Et doit-on interdire à la Russie d’exploiter les ressources de sa zone économique exclusive dans l’Arctique ? Enfin rappeler à ses adversaires potentiels qu’on peut les anéantir, n’est-ce pas le fondement même de la politique de dissuasion que les pays occidentaux suivent tout autant que les Russes ?

Michel Drain

Vladimir Poutine s’arme pour de nouvelles conquêtes

Le président se prépare à signer un plan de réarmement pharaonique, sur fond d’ambitions territoriales et d’escalade avec l’Occident.

Article du journal suisse « Le Temps » du 19 décembre 2017.

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Après la Géorgie, l’Ukraine et la Syrie, le Kremlin se prépare-t-il à un nouveau conflit? Diplomates et experts militaires guettent des éléments de réponse dans le Programme gouvernemental d’armement 2018-2027, qui doit être signé le 22 décembre par le président, Vladimir Poutine. Ses contours ont déjà fuité lundi dans la presse russe: 336 milliards de francs de dépenses de réarmement sur les dix prochaines années. Le quotidien Kommersant y voit se dégager trois priorités: la modernisation de l’arsenal nucléaire, les armes de haute précision et la mobilité des forces spéciales.

Large panel d’armes sophistiquées

Les armes hypersoniques (se déplaçant à plus de Mach 5) occupent une place de choix dans le document. Le futur missile balistique nucléaire RS-28 «Sarmat» est ainsi défini comme comportant des blocs hypersoniques, tout comme le missile naval Zircon. Moscou va commander plusieurs bombardiers stratégiques (portant l’arme nucléaire) supersoniques Tu-160M2, et développer en parallèle un bombardier supersonique à long rayon d’action de nouvelle génération au nom provisoire de «PAK DA».

Une nouvelle génération de sous-marins nucléaires (Boreï-B) et de sous-marins diesel (Khaski), tous deux porteurs de missiles balistiques nucléaires, sont également dans les tuyaux. Les dépenses vers les forces navales ont été ramenées à égalité avec les autres armées (air et terre). Moscou semble abandonner l’idée d’un nouveau porte-avions et se concentre sur des frégates et des croiseurs lanceurs de missiles.

Le programme gouvernemental d’armement décennal devait être prêt en 2016, mais la récession économique l’a retardé. Hormis une pause cette année, les dépenses militaires n’ont cessé de croître au cours de la décennie passée, et à un rythme nettement plus soutenu depuis 2014.

Escalade

Le contexte international montre une inquiétante escalade continue entre la Russie et l’Occident. De récents incidents aériens ont été observés dans le ciel de la Syrie entre appareils russes et américains. Des incidents du même type avec les appareils de l’OTAN sont fréquents au-dessus de la mer Baltique. Les accords sur la dissuasion entre les deux grandes puissances nucléaires ne sont plus respectés. L’expert militaire Alexandre Golts note que «les dirigeants russes rappellent régulièrement aux autres pays que la Russie peut les anéantir. C’est ce qui explique que, même en des temps de sérieuses difficultés financières, la Russie maintienne coûte que coûte la parité avec les Etats-Unis.»

Pour ne rien arranger, Moscou a choisi lundi de se retirer unilatéralement du groupe de contact militaire conjoint avec Kiev et l’OSCE sur le respect du cessez-le-feu dans le Donbass. Réagissant à cette décision, l’ancien président ukrainien Leonid Kravtchouk a déclaré en marge d’une conférence sur l’OTAN que «[Vladimir Poutine] semble faire en sorte de créer un théâtre plus large pour une offensive élargie et plus profonde contre l’Ukraine». «Rien de tel qu’une Blitzkrieg victorieuse pour redresser une cote de popularité», confie un diplomate en poste à Moscou. Celle de Vladimir Poutine n’a jamais été aussi élevée qu’après la guerre avec la Géorgie en 2008 et l’annexion de la Crimée en 2014. «Ces trois victoires [avec la Syrie] faciles aiguisent la tentation de futures aventures», note le diplomate.
Retard technologique

Bases à l’étranger

Mais les options sont limitées et les forces armées russes conservent un retard technologique sur les armées de l’OTAN. «La Syrie a été un excellent terrain d’essai pour mettre au point les doctrines d’emploi», confie un expert militaire qui veut garder l’anonymat. «Mais la Russie n’a de toute façon pas les moyens d’assumer une campagne longue et complexe.» Pour ce spécialiste, le programme d’armement ne présage pas de changements fondamentaux.

Mais, en parallèle, la Russie met en place une politique de négociations diplomatiques visant à disposer de bases à l’étranger (Egypte, Soudan, Venezuela sont des exemples récents). Avec en perspective «la capacité de pouvoir déployer des bombardiers stratégiques et autres détachements expéditionnaires. Mais pas le déploiement d’une armée complète», poursuit l’expert. Selon lui, il faut suivre le redéploiement vers l’Arctique et les routes commerciales liées. Vladimir Poutine réclame en effet haut et fort sa volonté d’extension territoriale dans le Grand Nord.

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IDN-France

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