La Conférence de l’ONU sur le désarmement nucléaire reportée : bonne ou mauvaise nouvelle ?

Fin 2016, l’Assemblée générale des Nations unies avait adopté une résolution en vue de la tenue d’une Conférence de haut niveau sur le désarmement nucléaire. Cet événement sans précédent était prévu à New York du 14 au 16 mai 2018. Or, après le report en mars dernier de la réunion préparatoire, l’ONU vient de décider de reporter la Conférence elle-même à des dates qui restent à fixer.

Au sein du microcosme diplomatique, on s’interroge sur les raisons de cette décision. Selon certaines informations, alors que l’initiative de ce sommet avait eu pour origine le Mouvement des Non-Alignés, ce groupe d’Etats hétérogène s’était plus récemment divisé quant à l’utilité d’une telle conférence et peinait à trouver un pays volontaire pour en assumer la présidence. Il est vrai que, depuis la résolution de 2016, sont intervenues la négociation et l’adoption par plus de 120 Etats membres du Traité d’interdiction des armes nucléaires (TIAN). Pour certains membres influents du Mouvement, ce traité mérite certes d’être soutenu, mais il reste en-deçà de l’aspiration traditionnelle à une convention sur les armes nucléaires incluant un régime multilatéral de vérification similaire à celui mis en place pour les armes chimiques.

Selon d’autres interprétations du report de la conférence, l’élargissement du fossé entre les partisans de l’interdiction des armes nucléaires et les pays demeurant attachés à la dissuasion nucléaire, aggravé par les tensions entre les Occidentaux et la Russie, risquaient de vouer la conférence à l’échec. Au moment où apparaît une lueur d’espoir avec le sommet inter-coréen et la perspective d’un sommet américano-nord-coréen, certains préfèreraient éviter de mettre de l’huile sur le feu et préserver pour plus tard les chances d’un dialogue positif.

Une troisième explication, qui pourrait rendre positif ce report, est l’intention du Secrétaire général des Nations unies, António Guterres, de lancer à Genève le 24 mai un ambitieux plan de désarmement couvrant l’ensemble des catégories d’armes, y compris les nouvelles technologies, et lié à l’agenda de prévention des conflits. Il est logique que la conférence suive cette annonce et débatte de sa mise en œuvre au lieu de la précéder.

La session du Comité préparatoire de la Conférence d’examen du Traité de Non-Prolifération (TNP) qui se déroule actuellement à Genève montre à quel point les débats diplomatiques peuvent être affectés par une combinaison funeste d’acrimonie, d’autisme politique et de résignation générale. Un climat qui semble en effet peu propice à des avancées en matière de désarmement.

Pourtant, comme plusieurs experts de la société civile participant à la session de Genève ont eu l’occasion de le souligner, c’est précisément lorsque s’enveniment les relations que s’imposent le retour au dialogue et la réaffirmation des obligations contractées. Le plan en 12 points présenté par IDN ne fait que le constater, certaines mesures sont urgentes afin de réduire le risque, plus élevé aujourd’hui qu’à aucun moment de la guerre froide, d’une guerre nucléaire : abaissement du niveau d’alerte des forces nucléaires, règlement des litiges entre Etats-Unis et Russie dans le cadre des traités FNI et New START, réaffirmation de l’engagement de Reagan et Gorbatchev qu’« une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit pas être menée », etc. En effet, pour qu’un dialogue multilatéral au sein d’une conférence de haut niveau sur l’élimination des armes nucléaires ait un sens, encore faut-il que nous n’ayons pas tous été éliminés nous-mêmes auparavant par l’apocalypse nucléaire.

Marc Finaud

Membre du Bureau d’Initatives pour le Désarmement nucléaire – IDN

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