Les menaces russes de recours aux armes nucléaires en cas d’interférence de l’OTAN dans la guerre en Ukraine, mais surtout la combinaison des ambiguïtés de la doctrine russe, de l’existence d’armes nucléaires dites « tactiques » et des possibilités d’emploi délégué, accidentel ou non autorisé contribuent à une sérieuse aggravation du risque nucléaire. Raison de plus pour conclure que les armes nucléaires, loin d’assurer la sécurité internationale, servent de bouclier aux pays agresseurs persuadés de leur impunité.

par Marc Finaud[1] et Marie-Pia Norlain[2]

Crédits photos : Newsweek

LES MENACES DE RECOURS AUX ARMES NUCLÉAIRES

La traditionnelle « grammaire » de la dissuasion nucléaire en vigueur pendant et après la guerre froide, consistant à conserver aux menaces d’emploi des armes nucléaires un caractère à la fois implicite et défensif appuyé par des démonstrations de capacités, a subi avec l’invasion de l’Ukraine un dangereux renversement. Ces menaces ont pris plusieurs formes :

  1. Le 19 février 2022, dès avant la prétendue « opération spéciale », la Russie a lancé des manœuvres de ses « forces de dissuasion stratégique » (d’habitude conduites à l’automne) en présence de Vladimir Poutine et de son homologue biélorusse, Alexandre Loukachenko. Selon le ministère russe de la Défense, ces exercices avaient pour but de « tester l’état de préparation » des forces impliquées et la « fiabilité des armes stratégique nucléaires et non nucléaires. » Pour le chef d’état-major russe, Valéri Guérassimov, leur objectif principal était « d’entraîner les forces offensives stratégiques pour infliger une défaite garantie à l’ennemi ». Les manœuvres ont donné lieu à des tirs à partir de bombardiers TU-95 et de sous-marins et, selon le Kremlin, « les objectifs prévus (…) ont été accomplis pleinement, tous les missiles [ayant] atteint les cibles fixées. »
  2. Deux jours plus tôt, le président biélorusse avait annoncé que son pays était prêt à « accueillir des armes nucléaires » russes en cas de menace occidentale et que la Constitution serait révisée à cette fin par référendum le 27 février.
  3. Le 24 février, en annonçant l’invasion de l’Ukraine, Poutine a lancé une mise en garde à peine voilée : « ceux qui tenteraient d’interférer avec nous doivent savoir que la réponse de la Russie sera immédiate et conduira à des conséquences que vous n’avez encore jamais connues. »
  4. Le président russe a poursuivi son escalade verbale, le 27 février, en annonçant qu’il ordonnait « au ministre de la Défense et au chef d’état-major de mettre les forces de dissuasion de l’armée russe en régime spécial d’alerte au combat ». Selon la plupart des experts, ce degré supérieur dans le niveau d’alerte devait se traduire par le renforcement des centres de commandement et contrôle, ce que confirma Valéri Guérassimov.
  5. Les 18-19 mars, le ministère russe de la Défense a annoncé le lancement en Ukraine de deux missiles hypersoniques Kh-47M2 Kinjal qui ont détruit des cibles présentées comme militaires. Ces missiles air-sol sont présentés comme impossibles à détecter et intercepter et peuvent être équipés de charges nucléaires.
  6. Le 20 avril, c’était au tour du nouveau missile intercontinental russe Sarmat (ou Satan 2 pour l’OTAN) d’être lancé en tir d’essai à grand renfort de publicité. Également présenté comme « invincible » car indétectable, ce missile est capable d’emporter au moins dix ogives nucléaires et/ou des planeurs hypersoniques à charge nucléaire.
  7. Deux mois après le début des combats en Ukraine, alors que la situation de l’armée russe n’était pas à son avantage et que l’aide militaire occidentale à Kiev s’était accrue, Poutine a réitéré le 27 avril, dans un discours à Saint-Pétersbourg, ses menaces à l’encontre des pays occidentaux : « Alors ils doivent savoir qu’ils créeront une menace géopolitique pour nous, et devront savoir qu’il y aura une réponse, une frappe de réponse, rapide. Nous avons pour cela des instruments que personne n’a aujourd’hui, et nous utiliserons ces outils si c’est nécessaire, je souhaite que tout le monde le sache. »
  8. Quant à Serguei Lavrov, le ministre russe des Affaires étrangères, après avoir affirmé le 19 avril que Moscou n’utiliserait pas d’arme nucléaire contre l’Ukraine, il a estimé, le 25 avril, que, même si la Russie mettait tout en œuvre pour éviter une guerre nucléaire, ce risque était désormais « considérable », « sérieux et réel » et ne devait pas être sous-estimé.
  9. Dans l’escalade rhétorique peut-on encore rappeler l’extravagante émission « 60 minutes » de la télévision officielle russe du 28 avril au cours de laquelle il était expliqué, cartographie à l’appui, qu’il suffirait de « 200 secondes à un missile nucléaire Sarmat, tiré depuis l’enclave russe de Kaliningrad, pour atteindre et détruire Paris. » Or, comme l’ont souligné des sites de vérification des faits, le missile Sarmat n’est pas encore déployé, Kaliningrad n’abrite pas de silos de missiles intercontinentaux et le chiffre de 200 secondes ne tient pas compte de la  durée réelle d’un missile intercontinental.
  10. Au cours d’un exercice de simulation, le 4 mai, les forces russes ont ostensiblement inclus la Pologne et la Lituanie voisine comme cibles d’attaques de missiles à capacité nucléaire Iskander à courte portée depuis Kaliningrad.
  11. Dernier en date à brandir la menace nucléaire, l’ancien président Dmitri Medvedev a mis en garde le 14 avril la Finlande et la Suède contre les conséquences de leur adhésion à l’OTAN : « personne de sain d’esprit (…) ne peut souhaiter une hausse des tensions à sa frontière et avoir à côté de sa maison des (missiles) Iskander, (des missiles) hypersoniques et des navires avec des armes nucléaires. »Il a confirmé  le 12 mai cet avertissement en direction de l’OTAN : « le transfert d’armes par les pays de l’OTAN à l’Ukraine, la préparation de ses troupes à l’utilisation d’équipements occidentaux, l’envoi de mercenaires et la conduite d’exercices des pays de l’Alliance près de nos frontières augmentent la probabilité d’un conflit direct et ouvert entre l’OTAN et la Russie », conflit qui « risque de se transformer en véritable guerre nucléaire. »  

UNE DOCTRINE NUCLÉAIRE AMBIGUË

Après plusieurs moutures et révisions, la doctrine russe d’emploi des armes nucléaires avait été précisée le 2 juin 2020. Pour certains experts, cette doctrine consacre l’élargissement des conditions pouvant provoquer l’usage du feu nucléaire par la Russie et un glissement vers l’emploi en premier. Elle prévoit quatre hypothèses dans lesquelles Moscou se réserve le droit d’y recourir :

  1. « Une information fiable qu’un tir de missiles balistiques a été engagé contre la Russie et/ou contre ses alliés,
  2. L’emploi par un adversaire d’armes nucléaires ou d’[autres] armes de destruction massive [biologiques ou chimiques] contre le territoire de la Russie et/ou contre le territoire d’un allié,
  3. Une action ennemie contre des infrastructures critiques (militaires ou civiles) de nature à remettre en question la capacité de seconde frappe russe,
  4. Une agression conduite contre la Russie avec des armes conventionnelles de nature à remettre en question l’existence même de l’État. »

C’est surtout la dernière condition qui suscite l’inquiétude compte tenu de l’absence de définition ou de la nature subjective du concept de menace existentielle qui la sous-tend. S’agit-il de la menace de destruction totale du pays (mais on voit mal comment celle-ci pourrait ne résulter que de l’emploi d’armes conventionnelles) ou d’une menace contre la survie du régime actuel (par exemple du fait d’un coup d’État) (voir l’analyse d’IDN en 2020) ?

Aujourd’hui, dans le contexte de la guerre en Ukraine, aucune des quatre hypothèses ne semble exister qui justifierait l’emploi intentionnel d’armes nucléaires par la Russie contre l’Ukraine ou, a fortiori, contre l’OTAN. Dans leurs propos menaçants, Poutine et Lavrov se sont référés aux « déclarations belliqueuses » de dirigeants occidentaux ou à l’assistance militaire accordé par les pays occidentaux à l’Ukraine. Ces motifs n’entrent donc dans aucune des quatre conditions.

D’autres allégations de la Russie pourraient toutefois se révéler plus dangereuses. Elles concernent les accusations selon lesquelles l’Ukraine tenterait de se doter d’armes nucléaires ou possèderait déjà des armes chimiques et biologiques, donc des armes de destruction massive, qu’elle pourrait employer contre la Russie.

Dès son discours du 24 février justifiant l’invasion de l’Ukraine, Poutine a accusé les dirigeants ukrainiens : « ils revendiquent également la possession d’armes nucléaires ». Il s’agit en fait d’une interprétation abusive de propos maladroits tenus en avril 2021 par l’ambassadeur d’Ukraine en Allemagne pour appuyer la demande de Kiev d’adhésion à l’OTAN : « soit nous faisons partie d’une alliance comme l’Otan, (…) soit nous n’avons qu’une option : celle de nous armer et, peut-être, envisager le nucléaire. »  

Autre prétexte invoqué par la Russie pour invoquer un « chantage nucléaire » ukrainien, la demande, le 21 février 2022, au lendemain de la reconnaissance par Moscou des républiques ukrainiennes séparatistes, du président ukrainien Volodymyr Zelensky de consultations du Conseil de sécurité de l’ONU dans le cadre du Mémorandum de Budapest de 1994 : dans cet accord, la Russie, les États-Unis et le Royaume-Uni s’étaient engagés à respecter l’intégrité territoriale de l’Ukraine en échange de sa dénucléarisation, c’est-à-dire du transfert vers la Russie des armes nucléaires héritées de l’URSS (et qui étaient restées sous le contrôle des Russes). Le 1er mars, dans son discours par vidéo à la Conférence du désarmement de Genève, Sergueï Lavrov a sans ambages accusé l’Ukraine de vouloir se doter d’armes nucléaires en affirmant : « L’Ukraine a toujours des technologies soviétiques et les moyens de mettre au point de telles armes. » Or, État partie au Traité de Non-Prolifération (TNP), l’Ukraine fait régulièrement l’objet d’inspections de l’Agence internationale pour l’énergie atomique (AIEA) qui n’a jamais soulevé le moindre soupçon quant à sa capacité ou sa volonté de détourner des activités nucléaires civiles à des fins d’armement.

Quant aux armes chimiques que possèderait l’Ukraine, le 16 mars, le ministère russe de la Défense a prétendu avoir saisi des documents militaires ukrainiens prouvant l’existence de dépôts de produits toxiques destinés à une attaque chimique qui serait imputée à la Russie. Il est vrai que, le 21 mars, s’est produit un incident au cours duquel un bombardement, attribué à la Russie, a provoqué une fuite d’ammoniac dans une usine d’engrais à Soumy. En réaction, la Russie a accusé l’Ukraine d’avoir miné l’usine pour provoquer une attaque chimique contre les forces russes.  En réalité, ce sont des allégations relatives à l’emploi d’armes chimiques par la Russie à Marioupol qui ont alerté l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et l’ont amenée à réagir le 11 avril. L’Ukraine est aussi État partie à la Convention d’interdiction des armes chimiques de 1993 et a été régulièrement inspectée par l’OIAC qui n’y a jamais rien décelé de suspect. En revanche, la Russie, bien qu’ayant officiellement achevé en 2017 la destruction de ses stocks, reste soupçonnée d’avoir conservé ou d’avoir la capacité de produire rapidement des neurotoxiques (« novitchoks ») qu’elle aurait utilisés pour des assassinats ciblés d’opposants en Grande-Bretagne. Le 11 mai, la Russie a de nouveau accusé les Ukrainiens d’avoir détruit un réservoir de nitrate d’ammonium pour en rendre responsable les forces russes.

Enfin, pour ce qui est des armes biologiques, également prohibées par la Convention d’interdiction de 1972 à laquelle la Russie et l’Ukraine sont parties, la Russie a affirmé à plusieurs reprises que le Département américain de la Défense finançait sur le sol ukrainien des laboratoires de production d’agents pathogènes destinés à la guerre bactériologique. L’armée russe aurait saisi des documents prouvant que ces laboratoires avaient reçu l’ordre de détruire des échantillons de peste, de choléra, d’anthrax et d’autres agents pathogènes dès le début de l’offensive russe. Lorsque la Russie a porté ces accusations au niveau du Conseil de sécurité de l’ONU le 11 mars, outre les démentis formels de l’Ukraine et des États-Unis, le Conseil a entendu Izumi Nakamitsu, la Haute-Représentante du Secrétaire général pour les affaires de désarmement, déclarer : « L’ONU n’a connaissance d’aucun programme d’armes biologiques [en Ukraine]. »

Il est vrai que, lors de la dissolution de l’URSS, les États-Unis ont lancé un programme multilatéral de financement d’élimination des armes de destruction massive en Russie et dans plusieurs anciennes républiques soviétiques, dont l’Ukraine, programme non seulement accepté mais aussi co-financé par Moscou jusqu’en 2013 dans le cadre du G8. En Ukraine, ce programme s’est poursuivi sous la forme de soutien à la détection d’agents pathogènes dangereux et à la sûreté et à la sécurité des laboratoires biologiques. Ces installations, loin d’abriter des programmes militaires secrets, sont restés pleinement transparentes et ouvertes à de nombreux observateurs internationaux. Les accusations russes sont donc de la pure désinformation.

ARMES NUCLEAIRES « TACTIQUES » ET RISQUE D’EMPLOI INCONTRÔLÉ

Selon la Fédération des Scientifiques américains (FAS), qui maintient les estimations les plus fiables de l’arsenal nucléaire russe, sur un inventaire total de 5 977 armes, apparaissent trois catégories d’armes :

  1. Les armes dites stratégiques, à longue portée et à fort pouvoir de destruction, s’élevant à un total de 2 565 (lancées de missiles terrestres ou sous-marins ou de missiles air-sol et bombes aéroportées),
  2. Les armes dites non stratégiques (ou « tactiques ») et défensives, à plus courte portée et pouvoir de destruction plus faible, estimées à 1 912 (lancées de bombardiers, missiles, bombes ou torpilles),
  3. Les armes vouées au démantèlement, chiffrées à 1 500.

La principale caractéristique des armes dites non stratégiques est que, contrairement à quelque 1 588 armes stratégiques, elles ne sont pas considérées comme déployées. Ceci signifie que les ogives nucléaires sont stockées séparément de leurs vecteurs (missiles ou bombardiers) et qu’un déploiement de ces armes en vue de leur emploi dans une bataille nucléaire prendrait du temps – afin de permettre la vérification d’une alerte ou une négociation avec l’adversaire pour éviter l’escalade – et serait assez facilement détecté par les satellites d’observation. Pour leur part, les quelque 100 bombes à gravitation B-61 américaines entreposées dans des hangars de cinq pays membres de l’OTAN (Allemagne, Belgique, Italie, Pays-Bas, Turquie) sont considérées comme déployées car, même si elles ne sont pas déjà fixées sur les avions de combat, cette procédure pourrait intervenir rapidement et discrètement.

S’agissant de la puissance destructrice des armes nucléaires tactiques russes, elle s’échelonne entre quelques kilotonnes et 350 kt (pour mémoire, la bombe d’Hiroshima a dégagé une puissance de 15 kt).

Lorsque Poutine a ordonné la mise en alerte des forces russes de dissuasion le 27 février, l’un des signes qui auraient pu susciter l’inquiétude aurait été le déploiement des armes nucléaires non stratégiques. Apparemment, à ce stade, il n’en a rien été. C’est probablement ce qui a amené les dirigeants américains à annoncer que, de leur côté, aucun changement du niveau d’alerte n’était justifié. Tout au plus la porte-parole de la Maison-Blanche, Jen Paski, a-t-elle souligné qu’« une telle rhétorique provocatrice était dangereuse et aggravait le risque d’erreur de calcul. »

En effet, les principaux risques nucléaires liés aux armes tactiques résultent d’une combinaison de facteurs :

  1. La délégation du pouvoir de déclencher un tir nucléaire : même si l’ordre de lancer une attaque nucléaire doit émaner du président russe, l’état-major de l’armée possède le contrôle physique du déverrouillage et des codes d’autorisation. L’état-major est donc capable de déclencher un lancement de missiles avec ou sans le feu vert du président soit directement à partir d’un centre de commandement soit après avoir délégué l’ordre de tir à des commandants de forces terrestres, aériennes ou sous-marines. L’idée est de conserver une capacité de lancement en cas de décapitation de la direction politique. Or, comme on l’a vécu pendant la guerre froide avec une douzaine de graves incidents, un système de contrôle décentralisé reposant sur le principe du « lancement sur alerte » (« launch on warning ») cumule les risques d’erreurs de calcul, de mauvaises interprétations ou d’initiatives intempestives.
  2. Aux risques inhérents à une situation de conflit, fût-il indirect comme actuellement entre la Russie et l’OTAN, s’ajoutent les risques potentiels provenant des nouvelles technologies telles que la cyberguerre ou la guerre spatiale, comme expliqué dans l’étude récente d’IDN. On peut aisément imaginer ce qui pourrait se passer si des acteurs étatiques ou non étatiques pénétraient virtuellement des sites de commandement et contrôle des armes nucléaires ou des satellites d’observation ou de communication dont dépendent le commandement et le contrôle de ces armes. Les piètres performances de l’armée russe en Ukraine laissent craindre la vulnérabilité de ces sites et, entre autres, des tirs nucléaires non autorisés.

CONCLUSION : L’ARME NUCLÉAIRE AGGRAVE L’INSÉCURITÉ DU MONDE ET ASSURE L’IMPUNITÉ DES AGRESSEURS

La plupart des réactions gouvernementales ou des milieux de la recherche face à l’agression russe en Ukraine a consisté à affirmer que la dissuasion nucléaire avait fonctionné en protégeant les alliés des puissances nucléaires occidentales et à justifier l’augmentation des budgets militaires, y compris pour la modernisation des forces nucléaires. Le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangère, Jean-Yves Le Drian a répondu aux menaces nucléaires russes par un avertissement : « L’Alliance atlantique est aussi une alliance nucléaire. » Alors que les dépenses militaires mondiales avaient déjà en 2021 crevé le plafond des 2 000 milliards de dollars, et en dépit de l’analyse des faiblesses militaires démontrées par Moscou, l’invasion russe a incité de nouveaux pays à encore augmenter leurs budgets d’armement et deux pays neutres, la Finlande et la Suède, à se placer sous parapluie nucléaire américain.

En réalité, comme souligné par Jean-Marie Collin, porte-parole d’ICAN, « on constate surtout que posséder une arme nucléaire est le meilleur moyen d’aller faire la guerre. Le fait que la Russie ait l’arme nucléaire dissuade les autres pays d’aider l’Ukraine, car il y a une peur du nucléaire. Le nucléaire est donc un facteur créateur de guerre. » Formulée différemment par un groupe d’experts, la question principale est : « la dissuasion nucléaire, voulue comme une protection, ne se révèle-t-elle pas plutôt une arme incitant celui qui en dispose à mener avec impunité tout type d’exactions, y compris sur des cibles civiles, comme à Marioupol et Boutcha ? »

Pour le philosophe Gaspar Koenig,  « il est probable que Poutine, tout à ses fantasmes historiques, se voie comme le justicier de la Grande Russie. Quitte à anéantir la planète entière. Par ailleurs, comment ne pas craindre un ‘cygne noir’ atomique quant deux mille armes nucléaires sont à tout moment prêtes à l’emploi dans le monde, que l’escalade diplomatique et militaire peut rapidement devenir hors de contrôle, et que la responsabilité du déclenchement dépend peu ou prou d’un seul cerveau humain ? »

Autant de raisons pour renforcer la mobilisation en vue de l’élimination de toutes les armes nucléaires qui, loin de garantir la sécurité du monde, la menacent à chaque instant.


[1] Vice-Président d’IDN.

[2] Étudiante en Master à Sorbonne Nouvelle et à l’Institut d’Etudes européennes, stagiaire à IDN.